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Dorothée : Que les enfants s’amusent !

Télé Magazine – 11 avril 1981

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UN petit bar, du côté de l'Olympia... Sur un fauteuil de velours rouge : Dorothée. L'œil très vif, pétillant de malice ; une queue de cheval marrante qui dégage un coup d'une incroyable longueur ; un chemisier avec un grand col volanté, très petite fille sage ; deux tartines beurrées pour compléter l'image de la plus ingénue de nos speakerines.


Que sera ce spectacle à l'Olympia que vous répétez en ce moment ?
C'est mon premier vrai passage sur scène : du 9 au 20 avril. Cela s'appelle « Dorothée au pays des enfants » et c'est une comédie musicale pour enfants, écrite un peu sur mesure pour moi. J'avais déjà enregistré, en décembre 1979, un premier disque avec ce même titre, puis tourné ensuite l'adaptation télévisée qui avait d'ailleurs fait l'objet d'un show, aux pieds de la Tour Eiffel, pendant les vacances de Noël.


Racontez-nous un peu ce conte musical...
Dorothée est un personnage vivant, qui écoute un disque et qui, d'une manière magique est transportée au pays où les gens sont des chansons. Lesdites chansons sont symbolisées par des instruments ainsi, le violoncelle c'est la chanson comique, le violon la chanson d'amour, la boîte à musique la chanson triste, le bandonéon la chanson timide, et le sifflet la chanson ratée ! Mais il y a hélas dans ce pays, d'horribles dissonances qui ne supportent pas les chansons et qui leur font la guerre.


A-t-on le trac lorsque l'on joue devant des enfants ?
Oui. J'ai très peur, mais c'est une peur intéressante. Jouer en direct, devant deux mille enfants, ce n'est pas rien. C'est un public très dur, très exigeant et qui n'a peur de rien. Un enfant, si quelque chose ne lui plaît pas, il le dit, il manifeste, il hurle, il proteste ! D'autant plus que nous les faisons totalement participer : le spectacle a été écrit pour eux, à travers eux ; ils connaissent par cœur les moindres airs de « Récré A2 », et deux mille bambins qui se mettent à chanter avec vous, c'est la fête !


Est-ce que c'est difficile de trouver le ton juste avec eux ?
Je ne trouve pas. J'adore les enfants et je leur parle d'égal à égal, comme si c'étaient des adultes sans qu'ils en soient. Je ne cherche pas mes mots, je ne bêtifie pas non plus. Je ne veux surtout rien leur apprendre et je suis déjà assez triste de voir, dans notre monde moderne, combien les enfants vieillissent vite. Ce que j'aime, c'est les faire rire, avec un esprit finalement très « tartes à la crème » !


Qu'est-ce que cela vous fait lorsqu'on vous compare à Chantal Goya ?
J'admire beaucoup ce que fait Chantal. Son spectacle qui fait évoluer de superbes masques est plein de rêve, de féerie et elle joue avec énormément de naturel et de sincérité. J'ai simplement très peur des enfants qu'on fait travailler sur une scène car ils ont tendance à devenir terriblement cabots, plus exigeants et insupportables que des adultes. On a une
terrible responsabilité vis à vis d'eux. J'ai carrément opté, quant à moi, pour le gag, le comique de situation. Dorothée c'est un per- sonnage qui, dès qu'elle fait quelque chose, le rate.


Les enfants viennent-ils vous voir après le spectacle ? Comment réagissent-ils ?
Au spectacle de la Tour Eiffel, ils venaient tous, tirant leur maman par la manche, et disant, intrigués et un peu inquiets : « c'est elle, c'est elle » ! Un jour, j'ai vu une petite fille s'arrêter tout net dans la rue, devant moi, et se mettre à pleurer et à hurler ; une fois calmée, elle m'a dit « dis, tu reviens dans la télé ? » C'est ça le phénomène télévision : les enfants assistent à « Récré A2 » comme à un dessin animé, et ils sont tout étonnés de me voir en « vrai », sortie de ma << boîte >> !


Comment serez-vous avec vos propres enfants ?
Justement, je suis très inquiète. Je me suis souvent posé le problème. J'ai eu une éducation extrêmement stricte dont je ne me plains surtout pas - et en même temps j'ai toujours adoré rigoler. Comme toutes les petites filles sages, j'ai pris des cours de danse, mais je me suis fait renvoyer parce je dissipais mes petites camarades en faisant le clown ! Quand je vais chez des amis, j'apprends à leurs enfants à faire plein de bêtises ; j'ai ainsi montré à une petite fille comment gonfler ses joues et cracher sa purée : sa mère était ravie, car c'était une chose qu'elle ne connaissait pas ! ! ! Alors comment serais-je avec mes enfants, moi qui aime tant faire rire ceux des autres, qui adorent ceux qui savent être « vrais » pleins de vie, d'audace... ?


Marie CHARVOZ

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