L’entreprise Dorothée au top niveau
France-Soir – 12 avril 1989

Sa maison de disques réunit les Musclés, Bernard Minet et Emmanuelle. Ils sont tous entrés dans les classements des meilleures ventes de 45 tours.
Quel est le point commun entre Les Musclés (n° 2 au Top 50), Bernard Minet (n° 20) et Emmanuelle (n°47) ? Réponse : ils appartiennent tous les trois à l'écurie AB Productions. La maison de disques de Dorothée dirigée par Jean-Luc Azoulay et Gerard Sales. Au départ. Les Musclés - cinq gars bien de chez nous - assuraient en groupe l'animation musicale du Club Dorothée (sur TF1). Pour mettre de l'ambiance sur le plateau, nos cinq copains jouent leur chanson-fétiche, un truc imparable : « La Fête au village ». Huit mois plus tard. 500.000 exemplaires vendus... « Une formidable aventure, raconte Jean-Luc Azoulay, un succès auquel nous ne nous attendions pas du tout »
Deuxième sur la liste. Bernard Minet est batteur des Musclés. « Dis-moi Bioman » est son deuxième 45 tours classé au Top.
Comme les précédents. Emmanuelle, même si ses tubes ne sont pas signés de la même équipe, est aussi associée à la « compagnie » Dorothée. Ex-fan de « Do », elle est amie avec la fée des enfants et profite régulièrement du coup de pouce promotionnel offert par l'émission. Après tout, d'autres en font autant... pourquoi se gêner, même si Jean-Luc Azoulay s'en défend avec véhémence : « Ses tubes n'ont jamais été matraqués sur le Club Dorothée. Emmanuelle a une autre démarche et fait une promotion normale avec les autres médias. »
Les Musclés, Emmanuelle, Bioman au Top... en attendant le nouveau 45 tours de Jacky (« Rêveries d'un promeneur solitaire au pied du Fuji-Yama ») et, pour bientôt, celui de Dorothée, le troisième de Minet, le second d'Hélène (« Le train qui s'en va »). Une autre protégée d'AB Prod ? En dix ans. AB est devenu le premier label indépendant français en vendant du Dorothée (onze millions de disques) et en créant un style inédit de production d'artistes : le concept « famille-télé ». On serait tenté de dire « aussi belle réussite discographique que télévisée », si ces mots ne rendaient pas Jean-Luc Azoulay plutôt nerveux.
« Nous fonctionnons comme n'importe quelle maison de disques ; comme Virgin, par exemple, qui sort plusieurs productions Etienne Daho. Nous ne sommes pas liés à la télévision. AB disques existait avant AB TV et a eu trois titres en 1986 classés dans le Top (dont le générique des « Bisounours »), alors que Dorothée n'était pas sur TF1 (mais sur A 2, N.D.R.). Notre chiffre d'affaires, contrairement à ce que d'aucuns prétendent, n'a pas augmenté depuis « Club Dorothée ». L'émission existe grâce au disque, et non pas le contraire »
Plutôt « que de trust ». Azoulay, préfère parler de « famille » autour de Dorothée « Une équipe qui travaille et vit grâce à elle, c'est une question de chance. Est-ce que tout s'écroulerait si Dorothée décidait d'arrêter ce métier ? Vous savez. Do est une vedette énorme, mais tout peut arriver... » D'une humilité extrême, il préfère d'ailleurs minimiser son succès.
« A côté des tubes, nous avons eu beaucoup de disques dont je ne citerais pas les noms (Si ! Il a cité le premier 45 tours d'Hélène) qui n'ont pas marché. Vous savez, nous avançons sans stratégie, naturellement, au feeling... Rien n'est calculé. A chaque fois que nous avons voulu lancer une opération de marketing, ça a raté. » Mais craint-il l'overdose d'un public étouffé sous les productions AB ? « Je ne crains que l'overdose de jalousie. Notre seule stratégie est de plaire au public. Tant que le public achète, ça va... »
Florence TREDEZ