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Dorothée : "Je referais bien de la télé… Pourquoi pas !"

Retro - Octobre 2017

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Dorothée chanteuse, un phénomène !
Dorothée a sorti un nouvel album studio par an pendant 15 ans, soit 212 chansons, sans compter les compilations et les albums de chansons traditionnelles. Au total, la chanteuse a
enregistré 58 singles et 39 albums entre 1980 et 1997, pour un total de près de 17
millions de copies. En 1982, le 45 tours de Hou la menteuse, certifié disque de platine, s'écoule à 1.300.000 exemplaires. Cette même année, la chanteuse a vendu plus de 3 millions de disques. En 1989, l'album -Tremblement de terre- est disque d'or (100.000 ventes) dès sa sortie ! Elle a également investi les salles, avec deux Olympia, plusieurs Zénith et surtout le gigantesque Palais omnisports de Paris Bercy à trois reprises, durant trois semaines consécutives en 1992 et plus de 500.000 spectateurs. Elle détient toujours le record absolu de longévité pour une artiste féminine dans cette salle, avec 56 représentations, un nombre qui n'a été dépassé que par Johnny Halliday et Michel Sardou.


Une polémique qui fait date
Le succès de Dorothée et les choix éditoriaux de celle qui est aussi la Directrice des programmes jeunesse de TF1 ne laissent pas indifférents. Une jeune députée socialiste part en guerre contre les dessins animés japonais très présent dans les émissions du Club Dorothée, déclarant: «Les émissions qui visaient à éveiller l'intelligence des enfants ont disparu au profit d'un magma informe qui valorise la violence crue et la niaiserie sirupeuse », Ségolène Royal, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, va même jusqu'à publier un livre sur le sujet, Le ras-le-bol des bébés zappeurs, dans lequel elle affirme: « La violence est une solution de facilité. Plus un enfant a peur, plus il est fasciné Et ça fait de l'audience. » Dorothée reste à l'antenne mais le président du CSA de l'époque, Hervé Bourges, impose une signalétique pour les dessins animés les plus problématiques. Selon Bernard Minet, le chanteur des Musclés, cette croisade a coûté cher à la candidate à la présidentielle de 2007 : Si elle a perdu, c'est en partie à cause de ce qu'elle a fait à Dorothée. « J'en suis persuadé. C'est peut-être naïf mais l'explication m'amuse. Pendant les élections, j'ai vu défiler des centaines de messages sur Internet. Beaucoup de gens disaient qu'ils ne voteraient jamais pour elle à cause de "tout ce qu'elle avait fait". Pour la majorité, elle était d'abord celle qui avait fait arrêter le « Club Dorothée » »


Vous étiez proche de Cabu, le dessinateur de Charlie Hebdo assassiné le 7 janvier 2015 ?
On se voyait régulièrement, on dinait tous les trois avec sa femme. Il y avait deux Cabu, celui de Charlie Hebdo et celui du Grand Duduche. C'est ce dernier que j'aimais bien. Il était exceptionnel, d'une gentillesse extrême. Il m'emmenait écouter du jazz. Il avait toujours un calepin et un crayon avec lui. Il croquait les gens et là, on rigolait bien. Il m'avait fait le nez de Dorothée. Je ne sais pas comment ça lui était venu. D'autres ont essayé de me dessiner mais ce n'était pas aussi efficace. Cabu, lui, ce n'était pas méchant...


Pourriez-vous revenir à la télévision ?
J'ai déjà répondu à cette question sur le plateau de Cyril Hanouna: pourquoi pas ! La télévision me manque parfois.


Pour refaire le Club?
Ça, on me l'a déjà demandé une tonne de fois, et j'ai toujours refusé. Les jeunes de maintenant ne sont plus les mêmes qu'autrefois. Quand j'ai commencé, en 1972, ils avaient déjà un certain style avec lequel ils évoluaient. Maintenant, je trouve qu'ils grandissent drôlement vite. Trop, peut-être. Ce ne sont plus les mêmes enfants.


Et refaire l'émission avec une nouvelle équipe ?
Mettre en place un tel programme reste très compliqué. On va dire que c'est d'une autre époque. Et je ne suis pas sûre qu'on arrive à trouver une équipe aussi dingue que la nôtre. C'est dommage de vouloir remettre à l'antenne de vieilles émissions, d'autant que ça ne marche pas vraiment, comme « L'Académie des Neufs » récemment. Peut-être que les dirigeants de chaînes n'ont pas d'imagination pour lancer de nouveaux concepts. Pourtant, il y a encore des choses à explorer à la télévision.


Comment tout s'est-il arrêté ?
Il faut demander à la direction de TF1 de l'époque. Même si on se doutait que ça s'arrêterait un jour, on est toujours surpris quand ça arrive. La coupure a été brutale. C'est loin, maintenant... Mais je me souviens qu'on avait tous la gorge serrée lors de la dernière émission. J'essayais de ne pas pleurer mais on a tous fini en larmes. Ma déception, c'est de ne pas avoir pu saluer le public, leur dire au revoir à l'antenne. Dans la dernière émission, on termine par « A demain », comme à chaque fois…

Comment expliquez-vous le succès du « Club Dorothée » ?
On avait une réelle folie. On ne trichait pas et notre public devait le ressentir. Ça ne peut pas marcher sinon. Les enfants ne laissent rien passer.


Et le fait que votre popularité demeure ? Tous ces gens qui ont maintenant des enfants, voire des petits-enfants, n’ont pas oublié ce qu’ils ont vécu dans leur jeunesse… Je m’en aperçois dans la rue, au restaurant… On ne peut rester indifférent à ces marques d’amitié et de fidélité.


Qu'avez-vous fait après l'arrêt de vos émissions ?
J'ai pu m'occuper de moi, voir mes amis, ma famille. J'ai même essayé de peindre, mais, bien que Claude Monet soit dans mon arbre généalogique [elle est la petite-fille de Jean-Pierre Hoschedé, beau-fils du célèbre peintre, NDLR], j'ai dû me rendre à l'évidence : le talent n'est pas héréditaire. Professionnellement, il y a eu plusieurs projets : une sitcom aux côtés de l'équipe, un film au cinéma écrit par Jean-Luc Azoulay, un retour sur scène dans une comédie musicale pour Noël en 1998, une pièce de théâtre avec Jean Amadou au Théâtre des Deux Ânes, et même la création d'une chaîne de télévision à mon nom Dorothée Channel. Mais aucun n'a about...


Le changement de rythme a dû être impressionnant...
Avant, j'étais dans un tourbillon. Les 35 heures, on les faisait dans la journée ! Du matin au soir et même après, c'était du non-stop : enregistrement des émissions, puis on allait au studio et parfois il y avait encore un tournage derrière. Mais c'était bien. Après, la vie continue. Elle n'en est pas moins belle.


N'en avez-vous pas assez qu'on vous parle de ce programme aujourd'hui ?
Je ne peux pas vous dire oui. Quand je fais mes courses, tout le monde m'en reparle. C'est quelque chose qui a marqué une génération. Il faut dire que c'était spécial comme émission.


Que vous évoque la télé-réalité ?
Je déteste ça. Avant, quand on osait dire un gros mot à l'antenne, on se faisait taper sur les doigts. Maintenant, quand je vois toutes les vulgarités qu'on diffuse, je suis abasourdie !


Un passage à Bercy à l'occasion des 30 ans de la salle en 2015, un coffret de CD en 2016. C'est reparti ?
Un retour sur scène ? Il ne faut jamais dire non... Moi, je ne ferme pas les portes. Pourquoi pas. En tout cas, quand j'ai chanté à Bercy. C’était de la folie, une émotion énorme, j'en ai tremblé.


Revoyez-vous les gens de l’équipe ?
Bien entendu ! On a travaillé des années ensemble. Nous étions une famille. Les ponts ne sont pas coupés, loin de là. Ariane a créé sa société de production avec son mari, Rémy (Sarrazin), un ancien des musclés. Corbier fait toujours de la musique, Jacky de la télévision. Il n'y a que Patrick qui est parti vivre à Miami et avec qui nous n'avons plus de contact.


Est-ce difficile de vivre avec le personnage de Dorothée ?
Mais ce n'est pas un personnage, c'est moi !


Par Christian Charreyre

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