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Dorothée : "Je n'ai jamais cru au père Noël"

Interview - Janvier 1993

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Quand on aime les enfants, on a toujours 20 ans. La preuve : Dorothée anime des goûters cathodiques depuis 1974. Pour « Interview », elle raconte sa success story : travailler en s'amusant. La télé, Dorothée, c'est vraiment un jeu d'enfants ?

Crois-tu encore au Père Noël ?
Je n'ai jamais cru au Père Noël ! Bizarrement, lorsque j'étais petite, on ne m'a jamais raconté cette histoire. Je savais que c'était les parents qui mettaient les cadeaux dans la cheminée ou sous l'arbre de Noël. Pour le reste, je vis dans le rêve toutes mes journées. Donc c'est une façon d'y croire.

On te traite de menteuse. On dit que tu affirmes aimer les enfants alors que tu n'es qu'une machine à gagner de l'argent.
Ceux qui disent cela n'ont rien compris. Tant pis pour eux. Je suis sincère. La preuve : le public est là. Tous les mercredis, 500 gamins se déplacent pour me faire des bisous partout. Et je les aime bien. Le public enfant est très critique. On ne peut pas mentir ou tricher avec lui : on a même dit que je n'aimais pas les enfants parce que je n'en avais pas. Quelle idiotie. Je ne pourrais pas faire tous les jours des émissions pour eux si je ne les aimais pas.

Ségolène Royal a dit un jour, à ton sujet : « Les enfants, c'est pas cher et ça peut rapporter gros »
C'est nul ! Et en plus, elle a des enfants. Quel manque de respect total envers eux. Complètement crétin ! Elle a dit cela pour vendre son bouquin sur les "bébés zappeurs". Et après elle s'est occupée de l'impact du décalage horaire sur les vaches... C'est vous dire.

Dorothée, c'est tout de même une très grosse affaire commerciale. Disques, T-shirts, pin's... C'est très rentable, non ?
Je ne calcule pas. J'ai commencé ma carrière gentiment, tranquillement. Sans réfléchir ou planifier. Je travaille au nez, que j'ai assez long. Femme d'affaires ? C'est une légende qui me fait sourire Comptabilité, chiffres, je n'y comprends rien. Gadgets ? En 1980, lorsque j'ai commencé l'Olympia, la tradition était de vendre des objets à l'entracte au nom de l'artiste. J'ai refusé. Les parents ont protesté, réclamé. Ils voulaient à tout prix des souvenirs pour leurs enfants. L'argent n'est pas ce qui me motive. Ce qui compte, c'est de m'amuser.

Tu es dépensière ?
Complètement. Une vraie cigale. Je rentre dans une boutique et j'achète. Je ne sais pas plus gérer mon compte en banque que mon unité de programmes. Côté budget, bien entendu.

Pourtant, tu joues à la marchande toute l'année sur TF1. Tu vas à l'étranger acheter les dessins animés que tu diffuses, non ?
Oui, mais je ne connais pas mon budget. Je ne m'occupe jamais des problèmes financiers. Je n'achète pas, je choisis. Mon truc, c'est la partie artistique et les financiers font leur boulot.

On dit que tu détiens le monopole des émissions pour la jeunesse sur TF1.
Faux ! Simplement, lorsque nous avons décidé de travailler ensemble, TF1 et moi, l'idée était de créer une unité dans les émissions pour la jeunesse. Auparavant on programmait « Rintintin » ou un dessin animé uniquement pour boucher les trous dans la grille de la chaîne.

A tes débuts, on t'avait trouvé nulle pour animer des émissions pour enfants.
A l'époque, ils avaient peut-être raison ! J'ai pleuré le jour où je l'ai appris, puis je me suis exercée à autre chose. Par exemple du secrétariat dans une société de robinetterie.

As-tu été obligée de coucher pour réussir ?
Jamais. On a essayé...

La télé, c'est un peu ta cour de récréation ?
Oh... Ce n’est pas pire que dans une banque. J'ai des copines qui y travaillent. Et là, bonjour les ragots.

Es-tu ravie d'avoir dépassé ta vieille rivale Chantal Goya ?
On n'a jamais été rivales, mais complémentaires. Ca faisait bien de lire dans la presse la guerre Goya / Dorothée. On se téléphonait aussi affolées l'une que l'autre. J'ai toujours été à ses spectacles et elle aux miens. On est copines comme pas deux. D'ailleurs Jean-Jacques doit toujours nous écrire un duo. Quand il veut...

On est méchant avec toi ?
Oh oui ! Je suis très sensible et la méchanceté m'atteint beaucoup...

Es-tu toujours autant attaquée sur la violence des dessins animés ?
Mais il n'y a pas de violence ! « Le petit poucet », tu crois que c'est mieux ? Les parents partent en forêt pour abandonner sciemment leurs enfants ! Bonjour l'angoisser ! Le jeune public sait très bien qu'il regarde une histoire. Le plus grave, ce sont les images du journal télévisé où, là, de vrais humains meurent. Au début de « Goldorak », ce fut un tollé général ! J'ai alors demandé aux gamins s'ils avaient peur. Ils m'ont dit : « Mais c'est un dessin animé, ce n’est pas du vrai ! »

On te reproche les dessins animés japonais !
Evidemment. Mais à la création de l'unité pour enfants, les dessinateurs français de qualité n'ont pu fournir. En attendant de constituer des équipes, il a fallu acheter à l'étranger ! S'attaquer aux Japonais, c'est du racisme ! Ils ne sont pas si fous. S'ils proposent ça à leurs enfants, ce n'est pas pour les traumatiser...

Est-il vrai qu'en Chine tu es une super-vedette ?
A Shanghai, oui ! Quand je fais une émission de télévision là-bas, il y a 650 millions de téléspectateurs qui me regardent. Ça me donne le vertige. Les Chinois sont fascinants. Ils ne comprennent pas un mot de ce que je chante et je ne comprends rien à ce qu'ils me disent ! Le plus drôle, c'est que seuls les adultes viennent à mes spectacles. Il n'y a pas un enfant.

Jusqu'à quel âge continueras-tu à amuser les enfants ?
Tout le monde me pose cette question? Ça marche. Tant mieux. Si je dois m'arrêter ? Ce que je ferai ? Je n'en sais rien. Je vous dirai plutôt cela demain !

Tu penses au lifting ?
Oh non ! J'ai trop la trouille !

T'a-t-on déja proposé de poser nue pour un magazine ?
Une fois, oui. Il ne faut pas exagérer. Je ne suis pas un canon. Autant montrer ce qui est joli. Je ne suis pas hyper bien foutue, je ne vois pas l'intérêt de montrer mon anatomie.

Te sens-tu sexy ?
Ce sont les autres qui peuvent le dire... Il paraît que quand je mets des jupes ou des robes, je le suis. Mais devoir enfiler des collants, porter des talons qui vous font mal aux pieds, quelle horreur ! En fait c'est de la flemmardise... Etre sexy, pour moi, c'est du boulot !

T'arrive-t-il de mettre des porte-jarretelles ?
Ah non ! Certainement pas ! J'ai essayé une fois d'en porter? C'est trop casse-pieds. Et puis on a froid entre le niveau du bas et le calfouet'. Je suis plutôt du genre Petit-Bateau. Du confortable. De l'efficace. Les bodys en dentelle, j'ignore.

Quelle tenue enfiles-tu le soir dans l'intimité ?
En ce moment, j'affectionne la version Babygros. Vous savez la grande combinaison en velours avec fermeture éclair. Ou alors la grande chemise de cow-boy douillette qui arrive jusqu'aux chevilles.

« Dorothée n'a pas enfants, pas d'homme non plus », dit la rumeur
Ma vie privée va très bien. C'est la vie qui est comme ça. Les enfants, il faudrait que je me dépêche d'en faire ou d'en adopter. Quant aux hommes, ce n’est vraiment pas facile d'être « Monsieur Dorothée »... La personne qui partage ma vie n'a pas à subir les assauts des photographes et de la presse. Je le protège. Mais rassurez-vous, je ne vis pas seule.

Tu es en manque de père ?
J'ai malheureusement perdu mon père très jeune. Il m'a encouragée à faire ce métier. Il était ingénieur mais très artiste et il m'a appris à chanter. On faisait des duos ensemble. Il ressemblait à Brassens. Un jour, une femme s'est jetée sur lui dans la rue pour lui demander un autographe. J'étais très fière. Je pense à lui non-stop. Je regrette qu'il n'ait pas connu mon succès. Mon père est ma grande tristesse.

Francis Bouygues est-il un papa gâteau ?
Complètement. Monsieur Bouygues me fascine. Il a une présence terriblement imposante.

Qu'est-ce qui te bouleverse ?
Tout. De la Somalie au cas de la petite Céline. Je suis assez sensible à l'écologie. On a créé « Terre attention danger » avec le docteur Klein. J'utilise le Club Dorothée pour aider les autres. Par exemple, chaque année, on fait des opérations « On pense à toi ». On récolte un maximum de jouets auprès des sponsors et on les distribue dans les hôpitaux.

Tu es une femme libre. Pas mariée. Alors, le Sida, l'amour ?
Grave. Terrifiant. Mais je suis fidèle, alors ça va. Je ne suis pas papillon. Vous n'en saurez pas plus. L'amour ? Comment vivre sans... Autrement la vie c'est juste du bois teinté.

Tu t'es déjà droguée ?
Jamais. A part les cigarettes. Je fume trop. Mais c'est à cause du stress.

Tu as dit : « Je ne triche et je ne mens jamais »
C'est vrai.


Monique Delanoue-Paynot

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