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François Corbier - Animateur

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Corbier, l’un des trois héros du « Club Dorothée », se rappelle avec émotion de son passage sur scène à Bercy, en 2010, au côté de Dorothée.

"J'ai plaqué le dernier accord et, montant des gradins et du parterre, comme sort du ventre de la terre le grondement d'un fleuve souterrain, magique et fou, le cri des cinq mille poitrines du public protéiforme m'a soulevé, comme l'aurait fait un bras de géant, pour me placer sur le nuage duquel vingt-quatre heures plus tard je ne suis pas encore redescendu !

Ah vingt dieux quel panard !

J'avais déjà un peu connu ça avec l'Olympia, mais là, dans le gigantesque hangar qu'est Bercy, les sensations sont démultipliées ! Étrangement la scène, pourtant immense, n'est pas pour autant inconfortable et, lorsque la lumière se fait un peu plus tendre, lorsque les projecteurs de Jacques Rouveyrollis baissent un peu, on pourrait presque voir les yeux du public et se croire dans un lieu intime. C'est le volume des rires et des bravos qui ramène à la réalité. Ici cinq mille personnes communient, chantent, dansent, écoutent, rêvent et pleurent, toutes ensemble et crient leur bonheur d'être là !

Dorothée avait choisi de ne pas me mettre en première partie avec Hélène, Bernard Minet, Sébastien Roch, Christophe Rippert, Ariane, Jean-Paul Césari, les Musclés, Jacky, etc., mais au milieu de son show personnel en seconde partie de soirée. Jean-Luc Azoulay, le producteur, m'avait demandé de chanter « Le nez de Dorothée », et je lui avais dit qu'en contrepartie je désirais faire, seul avec ma guitare, une chanson de mon répertoire actuel. Il en avait accepté le principe. Il restait ensuite à trouver quelle chanson choisir. J'avais hésité entre « Nucléaire », et « Les chanteurs de l'ossuaire » et finalement poussé par mes amis, j'ai décidé de proposer « La galère capitaine ». Le problème avec cette chanson, c'est que même dans une version courte… elle est encore très longue et je craignais, que pour cette raison, on me la refuse.

Le jour de la répétition, dans les locaux d'AB à la Plaine-Saint-Denis, j'ai sorti ma guitare. Je n'étais pas fiérot. Les nouveaux musiciens de Dorothée, (les Windows), Gérard Salesses, (le compositeur de tous les tubes de Dorothée, d'Hélène, des Musclés et des musiques de toutes les séries d'AB), Azoulay, Dorothée, Ariane, les techniciens, tout le monde était là et, à ma grande surprise, lorsque j'ai chanté, ce joli monde s'est tu et m'a écouté !... Ça fait un peu gland de dire ça, mais je vous promets que dans ce genre de situation, c'est plutôt rare ! En général, le pro est blindé. Des chansons, le pro, il en entend toute l'année, cinquante par jour, il en écrit lui-même... On ne la lui fait pas.

Ma chanson dure six minutes quarante ! Une chanson normale dépasse rarement les trois minutes trente... autant le dire, je prenais un max de risques en proposant une aussi longue ! À l'issue de celle-ci, chose qui ne m'était jamais arrivée pendant mes quinze années de télévision, toute cette équipe d'artistes, de techniciens, musiciens, chanteurs, etc. m'a applaudi ! Je n'en revenais pas. On est venu me féliciter et m'assurer que la durée de la chanson n'avait aucune espèce d'importance car : « elle est drôle et émouvante et on ne s'y ennuie pas un seul instant ! ». Bien sûr Jean-Luc Azoulay, en technicien habitué des tubes, (il est l'auteur de toutes les chansons de Dorothée, des Musclés, d'Hélène, etc. ...) aurait préféré que je formule ceci ou cela (très peu de choses en fait) comme lui l'aurait fait… mais il n'y eut aucune exigence, et la chanson a massivement été acceptée !

Ce premier examen fait, il restait à savoir comment le public de Dorothée allait comprendre et recevoir cette chansonnette qui raconte sur un rythme de blues picking ma vision des années de télévision ... Je n'en menais pas large au moment de monter sur le plateau… En fait j'étais d'autant moins rassuré que quelques jours plus tôt j'avais été (remarquablement, soit dit en passant) reçu en Suisse où on m'avait demandé de chanter les chansons de la télé, et lorsque je m'étais engagé dans le répertoire d'aujourd'hui, le public s'était instantanément remis à parler sans plus s'occuper de moi… Comment les choses allaient-elles se passer à Bercy ?....

L'après-midi du concert, après la répétition, mes camarades m'avaient renouvelé leurs compliments. Même Pat Leguen, le réalisateur fétiche des émissions du Club Dorothée, qui n'avait pourtant pas que ça à faire puisque le concert était intégralement retransmis en direct sur IDF1 et qu'il en était le responsable, mais aussi le personnel de Bercy et quelques danseurs vinrent me féliciter ! Tout s'annonçait donc sous les meilleurs auspices ! J'étais détendu, confiant. Pas traqueur pour un sou. Tout était normal. Il me restait à attendre le moment de descendre dans la fosse aux lions ! …

Je suis entré par le fond de la scène. Dorothée me tournait le dos. Tout était prévu. J'avais déjà ma guitare sur l'épaule. Dorothée se retourne, me voit, vient m'embrasser et j'attaque Le nez de Dorothée. La foule m'emboîte le pas et chante en ma compagnie. Jusque-là rien à dire, le public est dans son élément. En pays de connaissance en quelque sorte. Pour la chanson qui suit, La galère capitaine, le titre qui n'en finit plus, je dois changer de guitare. Le public en profite pour crier mon nom, on me proposer de chanter « Sans ma barbe », « Bienvenue aux nouveaux » … et j'attaque, sans rien annoncer, « La galère capitaine ».

Le silence se fait quasi dans l'instant, et je me dis : « Mon grand, un silence pareil c'est tout l'un tout l'autre ! Ou ils vont t'envoyer promener dans les secondes qui viennent, ou ce sera un moment d'éternité ! ».

Chaque couplet a été ponctué de rires, et quelques fois de franches explosions de joie ! J'ai senti la tendresse submerger la foule et lorsque la chanson s'est achevée, après le neuvième couplet, l'ovation a déferlé !

Dorothée est venue me rejoindre sur le plateau. Nous nous sommes embrassés une nouvelle fois et, sous les bravos, les cris, les applaudissements et les « une autre, une autre », j'ai laissé, avec une larmichette au coin de l'œil, la place à ma camarade qui a repris le cours normal de son spectacle pour encore une vingtaine de minutes !

Ensuite, dans les loges, des copains connus, ou pas, sont venus se faire prendre en photo avec moi devant la porte des toilettes… (Authentique), me serrer la paluche, me taper dans le dos, m'assurer de leur indéfectible amitié… Puis j'ai récupéré mon véhicule et nous sommes tous allés souper porte Maillot chez un Italien.

La neige qui était tombée pendant le spectacle s'était arrêtée pendant le repas mais elle commençait à geler. J'ai quand même pris la décision, à trois heures et demie du matin, de rentrer chez moi, à une centaine de km, en passant par l'autoroute. La neige crissait sous les pneus. Autour de moi du blanc, du blanc, du blanc, et pas question d'un coup de rouge ! Il paraît qu'on n'a pas le droit en conduisant !

Lorsque j'ai coupé le moteur en pénétrant dans mon jardin, il était cinq heures. Je suis allé me coucher.

« Si j'ai rêvé ? No comment ! »

Je ne quittais plus la scène de Bercy ! Quelqu'un pour m'en chasser se chargeait de couper les micros de Roland Guillotel et les lumières de Rouveyrollis, tandis qu'un autre type dont je ne voyais pas le visage, sans doute à cause de la neige, lâchait des ours et des loups…en criant : "sus à Corbier !"

Et depuis ? Ben depuis, je suis sur mon nuage !

Je ne perds pas de vue que, si confortable et si douillet que puisse être un nuage, même lorsqu'il est bas, il est toujours suffisamment haut pour qu'en se penchant on puisse aisément se casser la gueule ! Alors je profite du paysage, tandis que dans mes oreilles fusent encore les bravos, et, que sous le maigre soleil fond la neige du jardin, je cherche l'échelle de soie qui m'aidera à revenir sur terre, sans heurt et sans précipitation !

Une chute pourrait me faire enfler le crâne et il serait dommage qu'à mon âge je me voie contraint de faire élargir mes chapeaux pour une histoire de nuage au-dessus de Bercy… si joli soit-il !

Merci Dorothée de m'avoir invité à ta fête.

Merci Jean-Luc d'avoir accepté ma chanson

Merci aux musiciens, aux techniciens, aux choristes.

J'ai passé un beau, très beau moment."

Extrait du site internet officiel de Corbier

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