top of page

Dorothée, l’anti-star, vaut 250 millions de francs par an

France Soir – Vendredi 1 juillet 1988

1988 - Dorothée, l'anti-star, vaut 250 millions de francs.png

Dans le show-business, monde composite où se mélangent la chanson, le music-hall, la télévision, quelle vedette, financièrement parlant, pèse le plus lourd? Une petite bonne femme de 46 kilos. On la connaît sous le nom de Dorothée. Mine de rien, sans que nul n'y prenne garde, elle s'est hissée au premier rang d'un hit-parade où la notoriété se conjugue avec une authentique réussite financière.
Il n'y a pas quinze ans, elle s'appelait Frédérique Hochedé et n'était qu'une toute jeune et frêle speakerine de la télévision. Aujourd'hui, elle est le pivot d'une véritable industrie du divertissement qui emploie 300 personnes et produit, au bas mot, 250 millions de francs par an. En chiffre d'affaires, naturellement ne pas confondre avec les bénéfices...
Vingt-cinq milliards de centimes, c'est énorme pour celle que l'on comparaît, il n'y a pas si longtemps encore, à une souricette. Dorothée, c'est l'anti-star. Elle n'habite pas à Neuilly dans un hôtel particulier, mais un trois-pièces cuisine dans le XVIIe arrondissement. Elle ne roule pas en Rolls avec chauffeur, mais se faufile dans Paris au volant d'une curieuse petite Jeep, sa queue de cheval en bataille.


Pas de bijoux


Pas de manteau de fourrure, pas de bijoux, mais une montre en toc au poignet et des bagues de pacotille aux doigts. Elle fait sa cuisine elle-même, arrivant quand même à se servir de son four à micro-ondes et de ses robots ménagers.

A-t-elle une vie privée?
Peut-être, mais elle la cache bien, et quel temps trouverait-elle à lui consacrer?
<< Je n'ai pas d'homme, pas d'enfants dans ma vie; je n'ai rien d'autre que mon travail. >>
Raisonnement d'un systématisme qui laisse rêveur et dont on pensera que peu de jeunes femmes de son âge s'accomoderaient. Mais telle est Dorothée, et ce n'est pas en batifolant que la bonne et gentille fée qui, sans prétention, chante, danse et joue la comédie pour les enfants, est devenue l'animatrice et la vitrine d'une véritable usine ayant bureaux, avenue Kléber et studio, à Aubervilliers.
On y vend 1,5 million de disques par an. On y produit plusieurs émissions de télévision par jour. 130.000 fans peuvent être réunis au Zénith ou 600.000 dans les galas. Le complexe Dorothée édite aussi des jeux, des livres, des gadgets, achète sur le marché mondial 3.000 heures des meilleurs dessins animés, comme les Schtroumpfs ou Bisounours.


Pour les jeunes


La recette est simple: elle est la figure de proue d'un univers qu'elle a décidé de conquérir les jeunes. Aux hommes d'affaires, ses associés, de mettre en place la logistique. Ceux-ci, Jean-Luc Azoulay et Claude Berda, sont les mêmes qui, il y a dix ans, l'ont convaincue de sortir du petit écran pour paraitre sur une scène. Un pari que l'on a su gagné quand elle a vendu, l'année dernière, son dix-millionième disque.
Aujourd'hui, ce sont 1.200 heures de programme qu'ils livrent, clé en main, à TF1. A 120.000 F l'heure, faites le calcul: un très joli contrat.
Tout s'enchaîne: le label Dorothée devient le sésame qui permet de vendre, en disques et en livres, toutes les émissions achetées aux quatre coins du monde, de "Charlotte aux fraises" au "Chevalier du Zodiaque" ou "Bioman". Chaque matin, de l'usine, part un camion chargé d'albums à son effigie.
Et, pour que soit désormais dans ses meubles, on construit, à son usage exclusif, un nouveau studio de six mille mètres carrés, porte de la Chapelle, doté de l'équipement technologique le plus avancé.

Pierre Bruneau

Photo Lucien Jacquinot

bottom of page